3438639076?profile=original

Article original publié en 2012 - édité en janvier 2016

Ça manquait, ça n’était qu’une question de temps. L’expression to think out of the box, a muté en français. On se demande d’ailleurs pourquoi...?

 

L’AMÉRICAIN MET TOUT AU CARRÉ

 

Si les Américains font constamment appel à cette expression comme une invitation ou une exhortation à être créatif, c’est bien parce qu’ils pensent comme s’ils étaient « dans une boîte », in a box. Une autre expression consacrée est : things will fall into place, c’est-à-dire qu’il y a une forme, un moule, un grid system préexistant à la pensée, prêt à recueillir celle-ci et à la formater comme dans un PowerPoint, ou un moule Tupperware en forme de charlotte déclinable à l’infini selon ce qu’on mettra en garniture à l’intérieur des boudoirs. Quadrature du cercle : le quadrillage du territoire américain, les blocks qui découpent les villes. Block letters, block head... On arrive à blockbuster, d’un type de bombe qui détruisit Münich en 1940, au film qui fait recette aujourd’hui...  de mental block à blocage ?

 

Les Américains s’invitent alors à ne pas avoir une boxed-in mentality, c’est-à-dire une mentalité à ornières, et à penser out of the box, à sortir de leur boîte pré-formatée. Ils recherchent des well-rounded personalities, de la rondeur, tout en trouvant pourtant qu’être square signifie être équilibré, juste, direct, sans équivoque : a square refusal ou bien square and fair ou encore a square deal. Des expressions comme : a square meal, qui vient du plateau-repas préformaté servi aux soldats américains pendant la deuxième guerre mondiale, signifie un repas bien équilibré et roboratif. La lunch-box des écoliers américains a pris le relais. Au sens large et appliqué à une personne, square signifie « bien », de confiance : a square person. To square things out, serait mettre de l’ordre, clarifier, mettre au carré. Si carré il y a, cela nous mène au rebord, the edge. To have an edge, a cutting edge, c’est avoir un avantage sur autrui. To push over the edge devient dangereux, on sort du cadre et de border à borderline, il n’y a qu’un pas. Pour dire beige en anglais on dit off-white, qui est en dehors de la case du blanc pur. On bascule alors dans le blanc et noir, le oui ou non, dead or alive, paper or plastic, cash or credit. Ça s’emboîte bien non ? It falls into place...

 

LE FRANÇAIS PENSE EN CERCLE

 

C’est précisément l’inverse chez le Français qui fonctionne à géométrie variable nommant déjà la France : l’Hexagone, qui n’en est pas un. Les Français essaient de mettre les choses au carré, ont plus d’un tour dans leur sac, et font le dos rond, ayant recours aux ronds de jambe. Ils pensent que le monde ne tourne pas rond, parlent d'affaires rondement menées, de tournure d'esprit, voire d’esprit mal tourné, sont les champions des ronds-points, n’aiment pas les empêcheurs de tourner en rond, arrondissent les angles, découpent leurs villes en arrondissements et ne peuvent pas s’empêcher de faire le tour de la question en permanence en tournant autour du pot. Certes nous avons le Carré Hermès, un pré-carré du luxe français... Mais on sert souvent le carré d'agneau en couronne non ?... Bref, nous aimons le flou artistique.  On tourne en rond là, non ? Alors pourquoi nous demander à nous Français de “penser en dehors de la boîte” ? C’est carrément nous mettre en boîte, j’en conviens... Circulez, y'a plus rien à voir...

 

 Nathalie Monsaint-Baudry, essayiste, auteure de Être Française et Américaine, cristallisations culturelles

Photographie personnelle de trompe-l'œil du 15ème siècle, de Luca Signorelli, la signature du peintre dans le Dome d'Orvieto, Ombrie, Italie.

Essai Être Française et Américaine, cristallisations culturelles,

Téléchargeable gratuitement depuis : www.monsaintbaudry.fr3438639141?profile=original

E-mail me when people leave their comments –

You need to be a member of New York in French to add comments!

Join New York in French

Visit our bookstore

 

 

Visit our store

Learn French